« Certains hommes ont la vocation de la politique, comme d’autres ont celle de la peinture, du théâtre ou de l’invention mathématique. Ce sont des hommes à passion unique. Le politique, lui, sa passion, c’est de faire l’histoire de son temps; quand il réussit, il fonde des états ou fait des révolutions. Les vraies vocations et les passions absolues sont rares et qu’elles réussissent l’est encore davantage. »
C’est ainsi que Roger Vailland débute ce court texte, paru dans Le Nouvel Observateur du 26 novembre 1964, et dans lequel certains ont vu un testament politique. Il revient sur la profonde dépolitisation qui touche le peuple français, qui pour lui ne va pour autant pas de pair avec la perte d’une ancienne tradition révolutionnaire, qui explique certains sursauts, des moments de communion du peuple face à certaines injustices. Un texte terriblement moderne, d’une brûlante actualité en cette période électorale.
Préface de Marie-Noël Rio
1907, naissance dans l’Oise. Au lycée de Reims, rencontre Gilbert- Lecomte et Meyrat, puis Daumal. Surréalistes sans le savoir, ils forment le groupe des « phrères simplistes ». Premiers poèmes, premières drogues. En 1928, à Paris, entre comme journaliste à Paris-Midi . Opium, désordres. Entre dans la Résistance fin 1942. Forme et encadre plusieurs réseaux. En 1944, écrit son premier roman, Drôle de jeu (prix Interallié 1945). Après le débarquement, suit la reconquête comme correspondant de guerre. Jusqu’en 1950, collabore à de nombreux journaux, écrit une pièce radiophonique et son premier scénario, Les Frères Bouquinquant ; plusieurs essais, dont Le Surréalisme contre la Révolution et Le Saint Empire; une pièce, Héloïse et Abélard (prix Ibsen 1950), deux romans : Les Mauvais coups et Bon pied, bon oeil. En 1951, s’installe dans l’Ain avec Élisabeth Naldi, qu’il épousera en 1954. Un roman, Un jeune homme seul, un récit de voyage, Boroboudour. En 1952, sa pièce Le Colonel Foster plaidera coupable est interdite. Adhère au PCF. Deux essais, dont Laclos par lui-même, un scénario, deux romans, Beau Masque et 325 000 francs, une pièce, Batailles pour l’Humanité. En 1956, c’est le rapport Khrouchtchev. Proteste contre l’intervention soviétique en Hongrie.Désespoir, alcool, voyages. Son roman La Loi obtient le prix Goncourt 1957. En 1959, quitte sans bruit le PCF. Plusieurs scénarios, deux romans, La Fête et La Truite, une pièce, Monsieur Jean, deux essais, Les plus belles pages de Suétone et Le Regard froid, un récit de voyage, La Réunion. Roger Vailland meurt le 12 mai 1965 d’un cancer du poumon.